La Spiritualité de Madagascar

Peuplée depuis l’Afrique continentale et l’Indonésie-Malaisie, Madagascar possède une spiritualité, qui est dans ses bases commune à toute la grande île. Avec plus de 4 personnes sur 10 qui la pratique toujours d’après les chiffres officielles, le pays est un de ceux, sinon celui, qui reste le plus fidèle à la tradition dans tout le monde africain. Et comme on le verra, la spiritualité de Madagascar obéit aux fondements de la Religion commune à toute l’Afrique.

Madagascar (photo de Safidy NyAina)

La conception de Dieu

Les Malagasy (Malgaches) savent qu’il existe un Dieu unique, dont le nom est Zanahary. D’autres variantes l’appelent Andriamanitra. Zanahary est le Créateur de toutes choses, l’Ancêtre fondateur et primordial des Malagasy. De la même façon, Imana/Amon/Amen était l’Ancêtre Primordial des Egyptiens et des Nubiens, Nyame est l’Ancêtre primordial des Akan du Ghana et de Côte d’Ivoire etc…

Zanahary est source de vie, il est principe de vie, il est en haut et en bas de l’univers, il est aux quatre points cardinaux. En une phrase donc, Zanahary est partout. Ceci signifie que son énergie est dans toute chose vivante.

En Afrique, l’Ancêtre Primordial est la conscience qui par son Energie est à l’origine de la Création du monde. Cette Conscience énergétique est Unique et en même temps Multiple car elle est répartie dans tous les éléments de la Création. Toute chose qui vit est animée par la force vitale/énergie de Zanahary. C’est pourquoi absolument partout en Afrique, l’Ancêtre Primordial est perçu à travers les plantes, les animaux, les astres, les humains.

Zanahary pour les Malagasy est inaccessible, tout comme Mawu est inaccessible dans le Vodoun et Naba Wende est beaucoup trop éloigné pour les Mossi du Burkina Faso. La Conscience ne parlant pas directement aux humains, alors elle est en Afrique cachée, inaccessible, inaudible, insondable, inconnaissable, mystérieuse. Imana/Amen/Amon signifie Le Caché.

La Révélation n’existe pas en Afrique. C’est par la science et la déduction que l’Ancêtre Primordial a été découvert.

D’après le philosophe Eugène Regis Mangazala « toutes les richesses de l’homme (lehilahy) et toutes les valeurs de la femme (vehyvahy), se trouvent à la fois condensé à l’état de perfection et de plénitude en ZanaharyLa divinité passe à la fois pour géniteur et génitrice, pour père et mère ». Zahanary pour les Malagasy est donc androgyne, tout comme Amma (Dieu) est mâle et femelle pour les Dogons du Mali, ou encore Nyomo et Naa sont les aspects masculin et féminin de l’Ancêtre Primordial chez les Ga du Ghana. La forme féminine de l’Ancêtre Primordial en Egypte s’appelait Mout ou Amenata

Parties féminine et masculine de Dieu, Egypte antique. Cette idée de l’androgynie de l’Ancêtre Primordial est générale à l’Afrique.
Sculpture conservée au Musée du Louvre

A la suite de Zanahary est apparu le couple cosmique ciel-terre. Dans la spiritualité égyptienne, le couple ciel-terre (Nout-Geb) représente le deuxième couple issu du Créateur-la Créatrice, après l’air et l’eau. On retrouve cette conception aussi chez les Somali.

La mort et le culte des Ancêtres

La Spiritualité Malagasy professe les 3 étapes de la mort communes à toute l’Afrique, et que nous avons détaillées dans un article à part.

Pour les Malagasy, à la mort l’énergie du défunt va vers le ciel. C’est l’Ascension. Seule une personne qui a fait le bien pourra rejoindre la demeure du Créateur-la Créatrice. C’est le jugement dernier. L’énergie du défunt justifié, c’est-à-dire jugé positivement, renait et entre dans la lumière de l’Ancêtre Primordial, lumière symbolisée par le Soleil. C’est la résurrection et la fusion avec l’Energie du Créateur-la Créatrice.

Zanahary étant trop éloigné, ce sont les Razana, c’est-à-dire les Ancêtres qui ont accompli les 3 étapes, qui servent d’intermédiaires entre les humains et Zanahary. Quand les humains entrent en contact avec l’Ancêtre, celui-ci peut intervenir pour les humains auprès du Créateur-la Créatrice. 

Cérémonie aux morts

Les morts par ailleurs arrivent dans le pays divin pour continuer à y vivre comme ils le faisaient dans le monde visible. C’est pourquoi à Madagascar ils sont enterrés avec des objets tels que des vêtements, des chaussures, une radio, tout comme les pharaons étaient mis dans des tombes avec des trônes, des chars etc…

Après un certain temps, pour lui rendre hommage, on déterre le mort au cours de funérailles très coûteuses comme le font les Bamilékés du Cameroun. La dépouille est balancée dans tous les sens comme cela se fait chez les Baoulé de Côte d’Ivoire et leurs descendants Boni de Guyane. La même pratique existait il y a quelques décennies au Sénégal et existait en Egypte antique. La raison étant que le mort choisi s’il avance et de quel côté il veut aller.

Les défunts restent également des membres actifs et tutélaires de la famille tout comme au Togo, où quand on veut verser de l’eau dans une cour, on leur demande de reculer en disant « Ago’o ».

Les Malagasy font divers types d’offrandes aux ancêtres. Ils versent ainsi par exemple de l’alcool par terre pour qu’il atteigne symboliquement l’endroit où ils sont enterrés. C’est ce qu’on appelle la libation. La libation se fait partout en Afrique et est datée depuis l’antiquité égyptienne.

On entre également en communication avec les Ancêtres à travers les Mpimasy, qui sont des grands prêtres. Le Mpimasy invoque les énergies ancestrales et un d’eux prend possession de son corps. L’énergie ancestrale à travers le corps du Mpimasy peut ainsi se retrouver en train de parler une langue inconnue du grand prêtre et demander à boire de grandes quantités d’alcool qui laisseront le Mpimasy sobre quand l’énergie l’aura quitté.

Le Mpimasy est également un médecin qui invoque les énergies pour savoir quelle plante médicinale utiliser et comment, tout comme le Sangoma chez les Zulu d’Afrique du Sud ou le N’anga chez les Shona du Zimbabwe le font.

Cette connaissance de la Conscience énergétique et de sa répartition en toute chose permet à l’initié de saisir plusieurs sciences en même temps, car tout découle d’Un, tout est lié. C’est pourquoi les grands prêtres initiés en Afrique sont des savants multidisciplinaires. C’est pourquoi le premier ministre égyptien Imhotep, prêtre, astronome, physicien, médecin, architecte, mathématicien, fut le plus grand savant africain de tous les temps

Maât

Maât est l’ensemble des lois mises en place par le Créateur-la Créatrice, et qui lui ont permis de créer le monde. Les Humains doivent sur Terre vivre selon ces lois. Maât est ainsi appelé Fokonolona ou Fokonolo à Madagascar. Le Fokonolona est le clan, le groupe, le tout, la communauté sur laquelle repose cet ordre. La même définition est utilisée chez les Bassaa du Cameroun où on parle de Mbog pour désigner le monde et le peuple, ainsi que les lois qui régissent le monde et le peuple. Chez les Mossi du Burkina Faso, Mogho signifie le pays et l’ensemble des lois qui régissent le pays.

Maât, Egypte ancienne

En résumé, que ce soit dans la conceptualisation de l’Ancêtre Primordial et de la loi divine, dans la perception de la mort et la vénération des ancêtres, bref dans tout ce qui caractérise la spiritualité africaine, Madagascar est bien entendu africaine. Pour en savoir plus sur la Religion Africaine dans son entièreté, cliquez ici. 

Hotep.

Par : Lisapo ya Kama © (Tous droits réservés. Toute reproduction de cet article est interdite sans l’autorisation de Lisapo ya Kama)                    

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