Aïssata & Ousiré (Isis & Osiris), la plus ancienne des histoires d’amour

Cette histoire est la première et la plus ancienne histoire d’amour de toute l’humanité. C’est une histoire à l’origine de la fondation de la civilisation pharaonique et de la culture africaine dans son ensemble. C’est l’histoire d’Aïssata (Isis) et d’Ousiré (Osiris). 

Aïssata avec les ailes de Maât. Elle les étend pour protéger son époux sur lequel elle veille. 

En complément de nos présents écrits, la lectrice et le lecteur pourront se documenter sur la Religion Africaine, sur les 42 commandements de Maât, sur l’origine africaine de la notion des 4 éléments primordiaux et sur le rôle du roi dans la pensée africaine.

Tout d’abord, d’où nous vient cette histoire ? Eh bien elle a été imaginée et écrite par nos ancêtres de la vallée du Nil, plus précisément de l’école théologique d’Iounou, la plus ancienne, ville où la pensée religieuse fut centrée sur Râ, la manifestation lumineuse du Créateur-de la Créatrice (Imana/Amen). Voilà pourquoi les grecs en visitant la vallée du Nil ont baptisé cette ville Héliopolis, c’est-à-dire la Cité du Soleil.

Il est à noter que cette histoire a plusieurs aspects et niveaux. Nous parlerons ici uniquement du plus simple et du plus connu. 

Pesedjet, c’est à dire les 9 dieux primordiaux de la cosmogonie d’Iounou : Atoum-Râ (Dieu), Shou (l’air), Tefnout (l’eau), Geb (le ciel), Anouté (la terre), Ousiré et Aïssata (la matière fertile et bienfaisante), Souté et Nabintou (l’antimatière stérile et malfaisante).

Restitution synthétique de l’histoire

Ousiré (Osiris), Aïssata (Isis), Souté (Seth) et Nabintou (Nephtys) sont les enfants de Geb et Anouté.

Ousiré est le fils ainé, c’est un souverain, le premier roi mythologique de l’histoire. Souté est son frère cadet. Ousiré a Aïssata pour épouse et Souté a Nabintou pour épouse.

Mais le couple d’Aïssata et d’Ousiré est un couple fertile qui produit et apporte beaucoup de bienfaits à l’humanité, tandis que le couple de Souté et Nabintou est un couple stérile, notamment à cause de la stérilité de Souté.

Aïssata et Ousiré fertiles, productifs, sont le couple qui va civiliser l’humanité et lui transmettre les bienfaits de la civilisation, ce qui va le rendre populaire et prospère.

Souté, stérile, donc improductif et jaloux de cette fertilité, de cette popularité et de ce succès de son frère, va tenter de prendre le pouvoir et d’installer son règne et sa domination sur le pays. Pour faire cela il va utiliser la ruse et monter un plan avec ses compagnons pour mettre fin au règne prospère d’Ousiré et d’Aïssata, ceci pendant l’absence d’Ousiré encore parti civiliser l’humanité.

Ousiré et Souté

Ainsi Souté tend un piège à Ousiré dès le retour de celui-ci, et arrive à l’aide de ses compagnons à le capturer, le lier et à le jeter dans le Nil. Ousiré va donc être assassiné par Souté et mourir noyé dans les eaux du Nil, ce qui causera une énorme tristesse chez Aïssata sa femme et Nabintou leur soeur. Souté va profiter de la mort d’Ousiré pour asseoir sa domination sur le pays.

Aïssata, la veuve en larmes, va dans la douleur, aller à la recherche du corps de son époux. Elle le retrouve sous un sycomore et se réfugie avec lui dans les marais du delta du Nil. Mais Souté va finir par trouver le corps caché. Furieux, il va avec ses compagnons, tenter de le détruire pour faire disparaitre ce qui reste d’Ousiré à jamais. Pour ce faire il va découper et déchiqueter le corps de son frère et le disloquer en plusieurs morceaux qu’il disperse à travers le pays.

Ces évènements douloureux où Osiris souffre, meurt, etc.… sont appelés : La Passion d’Osiris. D’où le culte de la chair et du sang d’Osiris, repris beaucoup plus tard par les Romains, pour être attribué au personnage Jésus Christ avec l’eucharistie.

Aïssata, accompagnée de quelques partisans comme Nabintou, Inpou (Anubis), Djehouty (Thot), va aller encore à la recherche de toutes les parties du corps d’Ousiré dispersé. Elle en retrouve toutes les parties, sauf le sexe.

Aïssata va reconstituer le corps de son mari défunt. Avec l’aide d’Inpou, elle va procéder à son embaumement. Le corps étant inerte, c’est aidée de Nabintou (Nephtys) qu’elle va grâce à la connaissance divine, exécuter des rites qui vont permettre à Ousiré de ressusciter d’entre les morts et de revenir à la vie.

Ousiré reconstitué, mais encore inerte, sur son lit de mort. Aïssata  et Nabintou se préparent à exécuter les rites qui vont permettre de le ramener à la vie.

Mais ces rites n’auraient pas été efficaces si Ousiré et Aïssata n’avaient pas respecté les lois divines de Maât. Ousiré étant revenu à la vie, Aïssata va profiter pour s’unir à lui. Le sexe n’ayant pas été retrouvé, cette union aura lieu sans rapport sexuel. C’est l’immaculée conception. C’est de cette union que nait Horo (Horus).

Ousiré ressuscité, ayant retrouvé sa fertilité, va quitter le monde terrestre, monter dans l’au-delà et au ciel s’asseoir sur le trône divin, où il siégera pour le jugement divin selon les lois de Maât.

Ousiré ressuscité d’entre les morts, se levant de son lit 
Ousiré monté au ciel et est assis sur le trône divin dans l’au-delà

Mais Souté va se mettre à la recherche d’Horo (l’héritier d’Ousiré), pour le détruire aussi. Aïssata va cacher et protéger l’enfant, et le faire grandir.

Horo une fois devenu grand, va affronter Souté afin de venger son père et mettre fin au règne stérile de son oncle. Mais le combat entre Souté et Horo sera difficile, et l’affaire est portée devant le tribunal divin pour être tranchée. Aïssata grâce à son intelligence et ses stratégies, va réussir à faire en sorte que le verdict du tribunal soit favorable à son fils.

Ainsi Souté fut finalement vaincu, et son règne pris fin. Horo gagna grâce à sa mère notamment, la royauté pharaonique.

Quels enseignements peut-on tirer de cette histoire ?

Cette histoire laisse apparaitre quelque chose qui saute aux yeux, c’est le rôle d’Aïssata à tous les niveaux déterminants :

    • Lorsqu’Ousiré meurt, c’est Aïssata qui va aller à la recherche de son corps et le retrouver.
    • Lorsque Souté va déchiqueter le corps en plusieurs parties, c’est encore elle qui par son action, va en retrouver toutes les parties, le reconstituer, le momifier (conserver) avec l’aide d’Inpu (Anubis) afin qu’il ne périsse point.
    • Aidée de sa sœur Nabintou, Aïssata va par son action permettre à Ousiré de ressusciter d’entre les morts, et ainsi gagner la vie éternelle. C’est donc elle qui par tous les actes qu’elle pose, permet à Ousiré de revenir à la vie et lui ouvre la résurrection.

Ousiré n’est donc pas un sauveur mais plutôt un sauvé, grâce à sa pratique de Maât et à l’action déterminante et les efforts de sa femme.

  • C’est aussi elle qui par son action, lui permettra d’avoir une descendance, une réincarnation (Horo). Aïssata va protéger et éduquer Horo, et lorsque celui-ci sera grand, elle va l’aider à prendre le trône.

C’est donc Aïssata qui par son action va permettre à son fils d’avoir le pouvoir et perpétuer le règne du Bien.

Aïssata allaitant Horo, l’enfant divin venu sauver le règne du bien, fils d’Ousiré, futur héritier du trône, futur Pharaon.

Ousiré est donc aussi ce que tout un chacun est appelé à devenir après la traversée de la mort (c’est-à-dire un ancêtre justifié grâce aux lois de Maât), un ancêtre divin, intermédiaire entre Dieu et les Humains. Voilà pourquoi les textes de nos ancêtres  de la vallée  du Nil ont la mention Osiris à coté de chaque nom d’un défunt justifié dans l’au-delà. Voilà pourquoi on parle de l’Osiris Ani dans le papyrus d’Ani ou on peut parler encore de l’Osiris Cheikh Anta Diop, de l’Osiris Garvey, etc…

Si l’on tient compte de cette histoire, qui est ce qui inaugure donc les rites initiatiques qui permettent d’accéder à l’éternité ?

Eh bien c’est Aïssata. Ses lamentations lors de la mort de son époux sont devenues les lamentations rituelles des femmes qui pleurent (pleureuses) pendant les deuils partout en Afrique. En effet dans sa détresse, c’est elle qui débordante d’amour pour son époux, ne voulait pas qu’il périsse, et qui a fait tout son possible pour le ramener à la vie et à l’éternité.

Les rites et actions qu’elle a faits ont inauguré ces initiations qui permettent à tous d’accéder à l’éternité. Les invocations qu’elle a faites pour que son époux revienne à la vie sont devenues les modèles des invocations qui sont contenues dans le livre appelé communément « livre des morts », mais dont le vrai titre est : Formules efficaces pour la fusion dans la lumière divine. 

Puisqu’elle a donné le jour à Horus son fils (l’héritier) et l’a aidé à s’asseoir sur le trône de son père, elle est devenue la Mère Royale ou Reine Mère – Mout Nsout en égyptien ancien – la garante du pouvoir, son fils Horus étant l’incarnation du roi, le pharaon. Or le pouvoir royal ne tire sa légitimité que du respect des lois de Maât. Aïssata est donc par extension, propriétaire du trône, garante de Maât et de son application par le roi.

Horo grand, en âge de régner, mais Aïssata sous les traits de Maât ailée, veille toujours sur lui et sur son pouvoir, symbolisé par le trône sur lequel il siège, avec lequel elle fait corps et trône qui lui appartient à elle. 

Cette histoire étant liée à la fondation même de la civilisation de nos ancêtres de la vallée du Nil, le culte d’Ousiré est donc lié à celui d’Aïssata, avec une prédominance d’Aïssata dans le culte vu les actes importants qu’elle a posés.

C’est donc dans le cadre du culte d’Aïssata que le culte d’Ousiré est pratiqué.

Des égyptiennes pleurant pendant les deuils. Elles hurlaient, se jetaient par terre, les vêtements déchirés, se frappaient la poitrine, chantaient.
Certaines étaient payées pour le faire, reproduisant la scène des lamentations du mythe d’Aïssata et Ousiré, condition pour que le défunt accède effectivement au monde des ancêtres divins. On faisait même des séances annuelles de lamentations pour le défunt.
On retrouve ces scenes à l’identique aujourd’hui partout en Afrique, où les femmes sans s’en rendre compte, reproduisent naturellement les actes d’Aissata et Nabintou.
Chez les Bété de Cote d’Ivoire des femmes sont payées pour pleurer. Les Bamilékés du Cameroun font quant à eux des séances de lamentations périodiques pour le défunt. Voilà donc un trait incompris de notre culture qui prend tout son sens.

C’est aussi l’histoire d’Aïssata et Ousiré qui a servi à l’organisation du pouvoir sur le continent noir avec le roi qui exécute le pouvoir que lui transmet sa mère, et la Mère Royale étant garante du pouvoir divin, et étant le plus haut personnage de l’Etat : Linguere chez les Wolofs, Asantehemaa chez les Ashanti, Mefo chez les Bamilékés, Namwari au Zimbabwe, Magira au Kanem Bornou, Madaki-Magadjiya chez les Haoussa etc…

Le pouvoir d’Ousiré décédé étant appliqué sur Terre par Aïssata qui l’a sauvé et Horo qui l’a vengé.
Aïssata avec le trône royal du Pharaon sur la tête, en tant que propriétaire du trône et garante de l’ordre divin (Maât). Aïssata signifie le trône.

Hotep !

Pour savoir comment ce mythe a donné naissance à la tradition matriarcale africaine, cliquez ici 

Par : Lisapo ya Kama © (Tous droits réservés. Toute reproduction de cet article est interdite sans l’autorisation de Lisapo ya Kama)

Notes :

  • Civilisation ou Barbarie, Cheikh Anta Diop
  • Origines Egyptiennes du Christianisme et de l’Islam, Resultats d’un siècle et demi d’Archéologie ; Sarwat anis Al Assiouty
  • Isis et Osiris, Plutarque
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